Hypertension artérielle : mesure, valeurs normales, enjeux
1 - Définitions : de quoi parle t'on?
Quelle est la bonne "tension artérielle", docteur ? Il est classiquement admis que la pression artérielle normale doit être inférieure à 14/9.
En fait, on devrait dire 140/90 mmHg. Le "14/9" français est une exception culturelle parmi d'autres.
Au-delà de 140/90 mmHg (mesure au cabinet médical), on considère qu'il y a une hypertension artérielle.
On devrait parler de pression artérielle (et non de tension artérielle). De la même façon, on devrait pas parler de pression en millimètres de mercure (mmHg).
Alors il y a trois chiffres pour la systolique (premier chiffre, le plus élevé) et de chiffres pour la diastolique (2e chiffre). Par exemple, 152/87 mmHg ou 123/69 mmHg.
On s'arrête à la mesure du cabinet médical? En fait, les choses ne sont pas si simples...
2- La pression artérielle est un paramètre très variable.
La pression artérielle est un paramètre biologique qui varie beaucoup et qui est sensible aux conditions "environnementales" (stress, effort…) Elle peut varier de minute en minute.
A plus long terme, la pression artérielle augmente avec l'âge, en particulier la systolique.
Les conditions de la mesure de la pression artérielle sont primordiales de manière à bien l'estimer.
Il est impératif de recourir à des mesures ambulatoires c'est à dire au domicile (MAPA ou automesure tensionnelle).
3 - L'objectif de pression artérielle à atteindre n'est pas le même pour tout le monde.
Tout comme les accidents de la route ne surviennent pas à partir d'une certaine vitesse, les accidents vasculaires ne surviennent pas soudainement à partir d'un seuil de pression artérielle. La probabilité d'avoir un accident de la route dépend certes d'une vitesse excessive mais pas seulement. Elle dépend également de l'état de santé du conducteur (vue, audition, pathologie cardiaque susceptible de provoquer un malaise…) mais également d'une maladie préexistante risquant de se compliquer pour des chiffres de pression artérielle inférieure à 140/90 mmHg. Tout comme certains conducteurs vont plus facilement provoquer des accidents alors qu'ils roulent en dessous des limitations de vitesse...
Le seuil de pression artérielle peut-être différent en fonction de l'âge, de la présence de maladies cardiovasculaires ou rénales, d'un diabète...
Le seuil de pression artérielle normal peut-être revu un peu à la hausse chez les sujets âgés et fragiles car nous cherchons à limiter le risque de chute. Cela permet d'être un petit peu plus 'tolérants"... dans une certaine mesure. Il faut quand même traiter ces patients hypertendus !
Le seuil de pression artérielle est revu à la baisse en présence d'une maladie cardiovasculaire (infarctus ou accident vasculaire cérébral) d'une insuffisance rénale.
Il est également revu à la baisse quand le patient est à risque de développer une maladie cardiovasculaire (par exemple dans le diabète, insuffisance rénale). Une personne diabétique qui aurait un pression artérielle à 136/88 mmHg serait alors hypertendue et serait encore trop à risque…
En cas d'anévrisme de l'aorte, la pression artérielle systolique devra être diminuée en dessous 120 mmHg pour éviter de "mettre trop de pression sur un vaisseau dilaté".
4- Bref état de lieux : prévalence de la pression artérielle et son niveau de contrôle dans la population générale.
L'hypertension artérielle est le premier facteur de risque cardiovasculaire dans le monde.
Elle concerne 1/3 français, sa prévalence augmente avec l'âge. Elle survient principalement après 40 ans et parfois avant.
L'hypertension artérielle est favorisée (comme le diabète) par l'augmentation de la prévalence de l'obésité dans la population générale, elle-même associée à une sédentarité croissante.
En 2022, l'hypertension artérielle reste à la fois mal diagnostiquée et mal traitée.
Cela a été encore largement démontré dans une grande étude FLAHS 2019. Vous pouvez retrouver cette étude sur le site suivant : http://www.frhta.org/dangers_de_l_hypertension_arterielle.ph C'est une mine d'informations de qualité mais c'est très dense.
5 -Les raisons d'un si mauvais contrôle de la pression artérielle.
- la pression artérielle est difficile à mesurer précisément car elle est relativement variable. Les conditions de mesure doivent être strictes (au calme, au repos.... cf automesure tensionnelle)
- un certain nombre de personnes ont un suivi médical insuffisant, donc pas de mesure régulière de la pression artérielle
- la mauvaise observance des traitements antihypertenseurs (traitement non pris ou la plupart du temps oublié)
- l'effet blouse blanche est parfois surestimé ("elle est toujours haute quand je vais voir le Docteur")
- problème associé (par exemple syndrome d'apnées du sommeil).
6 - les complications en perspectives en cas de mauvais contrôle de la pression artérielle : maladies cardiovasculaires en tout genre.
- accidents vasculaires cérébraux ischémiques et hémorragiques (c'est le premier facteur de risque pour ce type d'événement)
- infarctus du myocarde et maladie coronaire
- artérite des membres inférieurs
Mais aussi des :
- insuffisances rénales chroniques pouvant conduire à la dialyse.
- démences ;
- perte de la vue par atteinte de la rétine dans les hypertensions artérielles sévères non traitées.
Bref, il faut prendre hypertension artérielle au sérieux : bien la dépister et bien la traiter pour éviter des complications.
Et pour mieux appréhender le risque cardiovasculaire, il est important d'obtenir une mesure ambulatoire d'une pression artérielle. Cela peut être obtenu soit par des automesures tensionnelles, soit par un holter tensionnel ou MAPA.